Madame, Monsieur,

Si vous suivez l'actualité, vous aurez constaté que les attaques ne proviennent pas uniquement des suspects habituels. Certes, ces entités échappent à la qualification de sauvages ; elles n'en sont pas moins résolues à saigner leurs proies à la gorge. Sans doute est-ce la loi universelle, qui consiste, de l'animal à l'entité abstraite, à se fortifier économiquement par une sorte de migration des âmes. La sape est le premier mouvement de la symphonie. Lui répond l'appel, désespéré, aux sens. Qui ? Où ? Quoi ? C'est une guerre nocturne sans tapage, sans éclat, où tout se joue sur le faux-pas. L'enjeu ? La position de force qui réduit la négociation à un mot vidé de son sens. N'est pas mort celui fait Mat, dit-on. L'on parle d'acte inamical, pas d'ennemi. Il est difficile de se dire que le cinéma, qui fait voir les choses qu'on ne voit que par ses fictions, n'est qu'un pâle reflet de la Comédie humaine dont chacun fait partie. Cela est difficile parce que, précisément, ces choses capables de glacer le sang avancent masquées, invisibles et trompeuses. Telles sont les intentions qui voient leurs entreprises facilitées par les nombreux biais cognitifs qui nous animent, parmi lesquels la propension à prendre ses désirs pour des réalités. (Le voisin doit être bon et au sens de l'époque, le lointain n'existe plus.) Un des symptômes est l'usage inadéquat des mots. L'incapacité à désigner les choses correctement dirige, comme une boussole faussée, vers un destin funeste. Lorsque la menace se signale, il n'est pas tard pour les agents appelés à la rescousse ; mais il est tard pour reconfigurer un ensemble qui s'est lui-même mal éduqué par conviction. Ces choses courantes de l'entreprise se retrouvent à tous les autres échelons. Dans le domaine de l'abstraction, le microbe n'échappe pas à ces considérations. Puisque les mots doivent avoir un sens pour diriger la pensée, nous nous sommes amusés à griffonner un petit covidictionnaire pour rectifier à doses d'humour le triste traitement que le sujet subit...

Amicalement Vôtre,

Roger Maginot
président de Beta-Oblique